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Projet de loi pour une République numérique: les citoyens au rendez-vous

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C’est aujourd’hui une première pour la République : un projet de loi a été enrichi par les internautes avant d’arriver au Conseil d’Etat puis au Parlement ! La consultation citoyenne que le gouvernement a voulue reposait sur une idée : celle que le numérique, par la mise en réseau des savoirs, des connaissances, des interprétations, était l’instrument idéal pour parfaire une loi qui, plus est, une loi pour la République numérique.  La concertation en ligne semble être un succès : 21 330 contributeurs ont voté près de 150 000 fois et déposé plus de 8500 arguments, amendements et propositions de nouveaux articles sur le site republique-numerique.fr.
Illustration ©Gouvernement.fr
 
Dans le cadre de la consultation publique en ligne sur le projet de loi pour une République Numérique qui s’est déroulée du 26 septembre au 18 octobre derniers, Axelle LEMAIRE, secrétaire d’Etat au Numérique, s’était engagée à ce que les contributions les plus soutenues fassent rapidement l’objet de réponses personnalisées du gouvernement. Cet engagement semble avoir été tenu puisque ce  jeudi 3 décembre, six semaines après la fin de la consultation publique, les 21 000 contributeurs au projet de loi Numérique peuvent consulter directement sur la plateforme www.republique-numerique.fr les réponses motivées du gouvernement  à 170 modifications d’article et 85 propositions de nouveaux articles  formulées par les participants, et ayant fait l’objet du plus grand nombre de votes.
 
Le numérique et ses usages sont au cœur d’un vaste mouvement de transformation de notre économie, de redéfinition de nos espaces publics et privés, et de construction du lien social. Les conséquences de ces évolutions sont dès à présent globales, et dessinent l’avenir de l’ensemble de notre société. La République du 21e siècle sera nécessairement numérique : elle doit anticiper les changements à l’œuvre, en saisir pleinement les opportunités, et dessiner une société conforme à ses principes.
 
Manuel Valls et Axelle Lemaire, secrétaire d’ é at chargée du Numérique, lors de la présentation de la grande consultation. Photo ©afp
 

Une façon indédite de co-écrie la loi
 
Pour la première fois, un texte de loi a été soumis par le Gouvernement à une discussion ouverte et interactive, avant sa transmission au Conseil d’Etat et son adoption en Conseil des ministres.
 
Pendant trois semaines, la plateforme en ligne a permis à chacun de contribuer au texte consultatif pour l’enrichir et le perfectionner. Les participants ont pu émettre un avis sur les différents articles du texte et faire des propositions de modifications, que d’autres internautes pouvaient soutenir.
Deux ateliers ont aussi été organisés par le gouvernement : un fablab de la loi avec des étudiants en droit pour le lancement à Matignon le 26 septembre et un « gouvcamp » au NUMA le 16 octobre.
D’autres réunions ont été organisées par des cabinets d’avocat, des associations, des classes de lycée, des groupements d’entreprises. Les contributions les plus populaires ont enfin vu leurs auteurs reçus par la secrétaire d’Etat chargée du numérique, à qui ils ont pu proposer en détail leurs propositions.
Après instruction, les contributions ont été intégrées au projet de loi pour une République numérique.
« Bien que n’exprimant pas l’ensemble des voix des français, cette consultation est un exercice réussi » déclarait Gilles Babinet, chargé pour la France du numérique auprès de la Commission européenne et multi-entrepreneur lors d’un entretien avec l’Institut Montaigne le 6 novembre 2015. « Comparé à une campagne sur les réseaux sociaux, 21 000 participants c’est un beau succès qui esquisse les contours d’une nouvelle forme d’expression de la démocratie. Quant à sa portée, la mise en ligne du projet de loi a notamment permis de débattre et de préciser la notion de transparence, plus particulièrement autour du principe de neutralité de l’internet (article 11 du projet de loi). »  
 
 
Six propositions qui ont changé et/ou modifié le projet de loi
 
L’ouverture du code des algorithmes publics
 
Sur proposition de plusieurs contributeurs individuels, le projet de loi a été enrichi par l’ajout d’un article créant une obligation de transparence sur les algorithmes publics. De nombreuses décisions individuelles des administrations (portant sur des personnes physiques ou des entreprises) font intervenir des algorithmes informatiques : c’est le cas par exemple de l’affectation des lycéens dans les filières d’enseignement supérieur via le logiciel « admission post-bac ».
Dès lors qu’une personne sera l’objet d’une décision administrative individuelle basée sur un traitement algorithmique, elle aura le droit de demander à l’administration de lui communiquer les règles constituant cet algorithme, ainsi que les principales caractéristiques de sa mise en oeuvre.
 
 
Cette nouvelle obligation de transparence permettra une discussion publique sur les règles algorithmiques publiques ayant des conséquences importantes dans la vie des citoyens : cela devrait encourager la confiance dans ces outils des décisions publiques qui sont appelés à prendre une place croissante.
 
Le délai de mise à disposition des travaux de recherche 
 
De manière quasiment consensuelle, il  émerge de la consultation une demande claire pour renforcer les droits des chercheurs à diffuser librement leurs travaux, lorsque ces travaux ont été financés par des fonds publics. A  la recherche d’un nouvel équilibre entre les positions des différents acteurs en présence à l’heure du numérique et de la société de la connaissance, le Gouvernement a fait évoluer la mesure.
 
Le droit à l’auto-hébergement 
 
Avec le déploiement des réseaux à très haut débit qui permettent à la fois des débits à la fois élevés et symétriques (envoyer des données dans le réseau aussi vite qu’on les reçoit), avec la volonté des internautes de sécuriser certaines données personnelles, avec le développement de solutions de stockage abordables et ergonomiques telles que les serveurs NAS, la possibilité d’utiliser chez soi un serveur, accessible depuis internet devient une réalité accessible à des non-initiés.
Les fournisseurs d’accès à internet auront ainsi l’obligation de ne pas brider ou empêcher le recours à l’auto-hébergement et le partage des données, ainsi stockées. Il s’agit d’une mesure qui vient utilement compléter le cadre et les règles posées en matière de neutralité de l’internet.
 
L’accessibilité des sites internet 
 
L’accessibilité des sites internet est la seconde mesure du projet de loi numérique relative au handicap. Celle-ci obligera l’ensemble des sites des administrations publiques à préciser, sous peine de sanctions pécuniaires, leur niveau de conformité aux règles d’accessibilité. Les grandes entreprises devront aussi proposer des services après-vente téléphoniques accessibles aux personnes malentendantes. Elle vise à renforcer l’accessibilité des sites internet des administrations en rendant obligatoire pour les personnes visées l’affichage de leur conformité (ou non-conformité) aux règles en matière d’accessibilité numérique ainsi que l’élaboration d’un schéma pluriannuel de mise en accessibilité.
 
 
 
La reconnaissance des compétitions de jeux vidéo
 
Les compétitions de jeux vidéo se développent de plus en plus et entraînent une activité économique importante autour d’événements comme la Paris Games Week ou la plateforme vidéo Twitch. Ces pratiques mobilisent une communauté trés nombreuse de joueurs car elles font appel à l’entraînement, l’habilité, la performance et l’esprit d’équipe. 
Des « LAN-parties » au championnat du monde de « League of legends », ces compétitions rassemblent amateurs et professionnels et attirent de plus en plus de sponsors, d’organisateurs et d’éditeurs de jeux vidéo.
Le cadre français actuel définit toutefois strictement les conditions dans lesquelles des jeux peuvent entraîner une rémunération (loterie, jeux en ligne).
Cette proposition vise à sécuriser l’organisation de ces compétitions en introduisant une exception à l’interdiction des loteries. Cette proposition est celle qui a reçu le plus de votes lors de la consultation.
Un article a donc été ajouté au projet de loi et une mission parlementaire sera lancée pour proposer un cadre complet pour développer ces activités et leur organisation, clarifier le statut des joueurs et soutenir le développement de ce secteur économique.
 
Donner des pouvoirs plus contraignants à la CADA 
 
Sur proposition notamment du Conseil national du numérique, le projet de loi a été enrichi par l’ajout d’un nouvel article 6 donnant des pouvoirs plus contraignants à la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA). L’objectif est que les administrations publiques appliquent effectivement les obligations d’ouverture des données publiques prévues par la loi. Pour cela, la CADA disposera désormais de deux procédures plus contraignantes qu’aujourd’hui (où elle rend des avis publics, qui sont suvis la plupart du temps mais qui restent consultatifs) :
– Lorsque la CADA a émis un avis public sur un refus de communication ou de publication de document par une administration, la CADA pourra l’inscrire sur une « liste noire » : le nom de l’administration qui refuse d’ouvrir ses données sera ainsi exposé publiquement, jusqu’à ce qu’elle s’éxécute (ou qu’une décision de justice lui donne raison).
– Lorsque la CADA constatera par elle-même qu’une administration ne respecte pas les nouvelles obligations de publications de ses données introduites par le projet de loi, elle pourra mettre en demeure l’administration de s’éxécuter. En cas de refus de l’administration, la CADA disposera de deux leviers : publier le nom de l’administration sur une liste noire, ou bien saisir elle-même le juge administratif (sans attendre qu’un citoyen fasse cette démarche).
 
 
Cela permettra de donner des moyens à la CADA pour mener une politique plus active et efficace pour faire appliquer les obligations légales d’oucerture des données publiques.
Dans la première partie du projet intitulé « Loi pour une République numérique », le texte fixe un cadre global à la politique française d’« open-data » : les données publiques de l’administration devront être ouvertes, gratuites et en libre circulation par défaut, tandis qu’un service public de la donnée sera créé afin de « définir des formats et des standards de qualité pour que ces données soient accessibles et réutilisables ». « Ces données seront à la disposition des entreprises, des associations, qui pourront proposer de nouveaux services, de nouveaux produits, qui pourront aussi rendre nos politiques publiques plus efficaces », avait  jugé Manuel Valls lors d’une interview à La voix du Nord fin septembre. 

 

Trois articles en question
 
– La transmission de données par voie électronique à l’INSEE : moderniser la collecte des données actuellement effectuées via des questionnaires papiers ou des enquêtes terrain. 
 
– Les travaux statistiques ou de recherche utilisant le numéro de sécurité sociale : les administrations françaises disposent de nombreux fichiers individuels qu’elles gèrent et qui sont soumis à la stricte protection prévue par la loi « Informatique et libertés » de 1978. Ces fichiers sont une source d’information très riche pour la statistique publique et pour la rcherche, surtout lorsqu’on peut mettre en relation les données que comportent deux fichiers. Le seul moyen certain de garantir un appariement exact entre deux fichiers est de recourir au numéro de sécurité sociale. 
Pour faciliter un tel usage du NIR (numéro d’identification au répertoire national d’identification des personnes physiques) dans les travaux de la statistique ou de la recherche publique, l’article crée une nouvelle procédure spécifique permettant de créer un code non signifiant dérivé du NIR : cela nécessitera l’adoption d’un décret-cadre pour définir ses modalités, puis un régime d’autorisation ou de déclaration à la CNIL, plus réaliste et rapide que celui d’un décret en Conseil d’Etat.
Pour la recherche, ce numéro sera spécifique à l’étude, afin déviter tout croisement ultérieur des données. Un assouplissement qui devrait faciliter considérablement les travaux de recherche français en sciences sociales, tout en protégeant mieux le NIR car il évitera les appariements portant directement sur ce numéro.
 
– Le paiement par SMS : la possibilité de réaliser, via les opérateurs télécoms, certaines opérations de paiement, et notamment de réaliser des dons par SMS, a donné lieu à de réelles réserves. Les explications données par les associations qui bénéficient du dispositif (Croix-Rouge française, Unicef, Secours populaire français,…) comme ceux qui le mettent en oeuvre (AFMM, Fédération bancaire française) ont permis d’éclairer le débat dans les derniers jours de la consultation.
Les réserves exprimées étaient d’ordres trés différents :
* quid de la sécurité et de la confidentialité des paiements ?
* quel modèle économique des opérateurs ? Visant plus particulièrement le caractère « obsolète » des sms, tout en sachant que des études récentes montrent que 2/3 des moins de 35 ans sont favorables au don par sms et le sms est la seule technologie accessible sur tous les téléphones portables.
Par ailleurs, l’article ne se limite pas au sms mais à tous les paiements multimédia. 
 
Cette large participation engage le gouvernement, à qui il revient de mettre à profit cet exercice d’intelligence collective pour améliorer son texte. Le travail de recensement et d’arbitrage est actuellement en cours. Il doit aboutir très prochainement, et le texte définitif sera aussi mis en ligne sur la plateforme republique-numerique.fr au moment de sa transmission au Conseil d’Etat.
 

Voir papier dans Libération « Plus de 140 000 votes pour la consultation en ligne sur la «République numérique» » ou, plus précisément, qui sont les acteurs de ce vote ?

Illustrations : Olivier Laude
 

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