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Ruée vers les astéroïdes

La fusée Falcon Heavy d’Elon Musk pourrait déclencher la ruée vers l’exploitation minière des astéroïdes

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Le monde entier a félicité Elon Musk, le milliardaire visionnaire, fondateur de Tesla et Space X, quand sa fusée Falcon Heavy, la plus puissante du monde, a réussi son pari. S’arracher de la gravitation terrestre, dans un tonnerre de feu, pour revenir un peu plus tard atterrir sagement sur notre bonne vieille planète. Une nouvelle ère de la conquête spatiale, nous avait-on dit, allait commencer. Nous n’avions pas aperçu que, non-contente de partir à la conquête des espaces lointains, cette fusée allait permettre d’engranger des quantités phénoménales de dollars, qui se chiffreraient en quintillions…  En effet, un scientifique vient de révéler que cette fusée est parfaitement adaptée pour aller exploiter, sur des astéroïdes, les minéraux si précieux que nos industries du XXIe siècle s’arrachent.
 
Selon Martin Elvis, un astronome du Harvard-Smithsonian Center for Astrophysics, la fusée géante Falcon Heavy pourrait augmenter considérablement le nombre des astéroïdes que l’on est en mesure de cibler pour effectuer des missions minières.  D’une centaine d’astéroïdes actuellement répertoriés, le scientifique affirme que le nombre de cibles potentielles pourrait être multiplié par 15.
 
Notre système solaire est rempli de millions d’astéroïdes, des mondes rocheux dont la taille varie de quelques mètres à des centaines de kilomètres de diamètre. La majorité des astéroïdes se trouve dans ce que les astronomes appellent la Ceinture d’astéroïdes, située entre les planètes Mars et Jupiter. Ces objets sont, pour beaucoup, des restes de la formation précoce du système solaire. Les astéroïdes géocroiseurs, quant à eux, traversent le système solaire intérieur et peuvent passer près de l’orbite de la Terre ou la traverser. L’un d’entre eux, un long cigare de métal sombre a fait frémir l’année dernière des millions de Terriens qui imaginaient une visite d’extraterrestres, transportés dans un vaisseau ressemblant à ceux des plus classiques films de science-fiction. Il n’en était rien, cet objet baptisé Oumuamua, était un astéroïde ferreux qui ne faisait que passer.
 
Oumuamua, l’étrange corps céleste en forme de cigare venu d’un autre système stellaire
 
Depuis plus d’un siècle, les humains ont envisagé la possibilité d’exploiter des astéroïdes, mais la logistique s’est avérée toujours très prohibitive. Le problème majeur est l’atterrissage sur un astéroïde. Pour le réaliser, il faut disposer d’un engin suffisamment puissant pour basculer de l’orbite terrestre basse, vers l’orbite de l’astéroïde. Pour Martin Elvis, Falcon Heavy remplit toutes les conditions pour mener à bien ce type d’exercice.
 
Les scientifiques calculent l’accessibilité des astéroïdes à partir d’une mesure propre à chaque astéroïde découvert. Cette mesure est appelée delta-v, changement de vitesse. C’est un raccourci pour définir combien de poussée il faut pour passer de l’orbite terrestre basse à l’orbite autour de l’astéroïde. Le delta-v se mesure en kilomètres par seconde. Les astéroïdes peuvent avoir des delta-v de 4 à presque 30 km/s.
On comprend dès lors que plus un engin est puissant, plus il ouvre le champ des astéroïdes possiblement exploitables. Falcon Heavy fait ainsi passer de quelques dizaines à plus de 1500 le nombre d’astéroïdes candidats à l’exploitation minière. C’est un saut considérable.
 

L’enjeu en vaut la chandelle

Bien sûr, direz-vous, posséder une grosse fusée ne suffira pas. Il faudra résoudre une multitude de questions techniques : atterrissage, extraction, transport, transformation, etc. Mais l’enjeu en vaut la chandelle.
En effet, les astéroïdes regorgent pour certains de métaux rares et précieux. On y trouve du fer en abondance mais aussi des minerais rares dont l’industrie des hautes technologies est particulièrement friande : du cobalt, du titane, de l’antimoine, du tungstène, du thorium, du silicium…
Sur ces morceaux de roches errant dans l’espace on pourrait trouver tout ce qu’il faut pour construire des stations spatiales, pour transformer l’eau qui s’y trouve en oxygène et hydrogène liquides, carburants des vaisseaux spatiaux. Et puis fantasme absolu, on y trouve de l’or.
 
L’astéroïde 169-Psyche – Image : Arizona State University
 
Ces astéroïdes recèlent des fortunes. Le fer contenu dans l’astéroïde 16 Psyche vaut à lui seul environ 10 quintillions de dollars. Ce chiffre ne vous dit rien ; c’est normal parce qu’il s’écrit avec un nombre impressionnant de zéros : 10,000,000,000,000,000,000 $. Comment les scientifiques –en l’occurrence, la NASA – sont ils parvenus à cette évaluation ? Ils ont estimé, à quelques kilos, près que cet astéroïde contenait 17,000,000,000,000,000 de m3 de fer (17 millions de km3). À 80 € la tonne, faites le calcul.
 
Toujours selon la NASA, si nous parvenions à extraire tous les minéraux présents dans les astéroïdes entre Mars et Jupiter, cela permettrait de faire un chèque de 100 milliards de dollars à chaque être humain vivant sur Terre ! Malheureusement, ce calcul n’est que théorique car même si ces sommes astronomiques étaient avérées, il y a peu de chance que la manne soit redistribuée aussi généreusement… Mais on peut toujours rêver.
 

La ruée vers l’or spatial

D’autres ne rêvent pas. Ils ont fait leur calcul : le lancement d’une fusée Falcon Heavy coûte 90 millions de dollars. Une paille en comparaison des gains possibles. Alors la ruée vers l’or spatial est lancée.
 
Elle est facilitée par une décision qu’avait prise l’administration d’Obama en 2015. Le Sénat américain avait, en effet, approuvé à l’unanimité une loi reconnaissant à tout individu « le droit de posséder, s’approprier, transporter, utiliser et vendre n’importe quelle ressource spatiale ». Ce texte s’appuie sur le traité de l’espace datant de 1967 pour le contourner dans une habile gymnastique sémantique. L’ONU de l’époque –nous étions en pleine guerre froide et l’URSS venait juste de lancer son premier Spoutnik – avait gravé dans le droit international l’impossibilité pour un État de décréter sa souveraineté sur un corps spatial. Mais le traité ne dit rien sur l’exploitation des ressources. Qui ne dit mot consent ? Le texte américain de 2015 précise donc qu’on ne peut être propriétaire d’un corps spatial. Soit. En revanche, on pourra s’en accaparer les ressources, et notamment les ressources minières. Nuance.

LIRE DANS UP : Le Sénat américain vote l’exploitation commerciale de l’espace. Bienvenue dans le Far-West spatial

La course folle vers les astéroïdes

Une loi faite sur-mesure pour des sociétés américaines créées pour l’exploitation des ressources spatiales. C’est le cas de Planetary Resources, une startup soutenue financièrement par le PDG de Google, Larry Page et le réalisateur de cinéma américain James Cameron. Cette société est fin prête pour construire de véritables stations-services de l’espace. En extrayant de l’eau et de l’ammoniaque que l’on trouve sur des astéroïdes, elle dit être en mesure de fabriquer, dans l’espace, le carburant nécessaire aux missions spatiales. Inutile de revenir sur Terre pour se ravitailler, on pourra faire le plein sur place. La société ne dit pas si ces stations-services des autoroutes de l’espace seront accompagnées de centre commerciaux et de chaînes de fast-food .
 
Deep Space Industries est une autre société créée en 2013. Elle repère déjà les astéroïdes éligibles à l’extraction minière et projette, dès 2020, de commencer des extractions afin de fabriquer des matériaux directement depuis l’espace. La société prévoit de se munir d’une flotte composée de nanorobots, les Firefly, qui auront pour mission d’ausculter les corps célestes pour mesurer leurs ressources minières potentielles. Une deuxième série de vaisseaux, les Dragonfly, permettront de ramener sur Terre jusqu’à 150 kg de minerais rares, voire des astéroïdes entiers de petite taille. L’ensemble est coordonné par un vaisseau amiral, le Mothership, qui transportera les nanorobots d’exploration au-delà de l’orbite terrestre et assurera les communications avec l’espace profond. La société prévoit enfin de mettre au point le remorqueur Harvestor qui sera capable de ramener un astéroïde entier vers l’orbite terrestre.
 
Kepler Energy and Space Engineering prévoit d’utiliser les technologies de guidage, de navigation et d’ancrage existantes issues de missions astéroïdes réussies comme Rosetta-Philae et Dawn.
Le projet utilisera le transfert de technologies de la NASA pour construire et envoyer un système d’extraction minière automatisé composé de quatre modules (AMS) sur un petit astéroïde afin de collecter des matériaux de surface. Chacun des quatre modules, après son travail réussi, fera son voyage de retour pour être ramené en orbite terrestre basse. Le projet prévoit d’être mené d’ici 2020.
 
La NASA et l’ESA sont depuis longtemps à l’avant-garde de l’exploration des astéroïdes. En fait, cinq comètes et dix systèmes d’astéroïdes ont été examinés de près par les astronefs des deux agences.
En 2013, la NASA a entrepris une mission de capture d’astéroïdes. L’astronef OSIRIS-Rex se retrouvera en août 2018 en contact avec l’astéroïde Bennu à deux millions de kilomètres de chez nous, arrachera un rocher, poussera l’astéroïde de son orbite pour une démonstration de déflexion et retournera sur Terre avec le bloc rocheux en septembre 2023.  Officiellement appelée la Mission de Redirection des Astéroïdes (ARM), son coût total est estimé à 1,25 milliard de dollars.
 
Cette course vers les astéroïdes représente des enjeux financiers colossaux mais également des enjeux géostratégiques. En effet, la quête des métaux rares est devenue une obligation pour toutes les industries du numérique et de la transition écologique. Pas de smartphone, d’éolienne, de voiture électrique, de satellites, d’objets connectés, de robots ou de nanotechnologies sans métaux rares. Ces matières premières hautement convoitées existent partout sur notre planète mais leur extraction représente un coût environnemental et de santé humaine considérable. Progressivement le monde a donc abandonné l’extraction de ces métaux à la Chine qui détient aujourd’hui 99 % du marché des métaux rares.

LIRE DANS UP : Chine : main basse sur la matière première des hautes technologies

Cette domination chinoise sur une des denrées les plus précieuses du monde actuel a de quoi inquiéter. C’est la raison pour laquelle les yeux se tournent vers le ciel. L’espace qui regorge de ces ressources, devient ainsi le nouvel Eldorado.
 
 

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